Les valises sont dans l’entrée avec les chapeaux. Fantôme a deviné qu’il ne serait pas du voyage. Je le vois à ses yeux tristes. Nous partons nous promener tous les deux comme tous les matins. La pluie tombe, chaude et bienfaisante. Le ciel est gris souris. Le tonnerre gronde. Les fils de haute tension grésillent. Un chevreuil nous attend à la mare avec une famille de poules d’eau. Les nénuphars en tapis sont toujours bien recroquevillés sur eux-mêmes. Ils se déplieront avec l’arrivée du soleil sur le plateau. Devant la maison, les branches du bouleau dansent. J’entends un air de bossa nova et pourtant j’imagine le lac Baïkal.
L’hiver de l’année 2015, je me suis plongée dans les livres de Sylvain Tesson dont Stéphane et moi avions lu, avant notre tour du monde, les récits co-écrits avec Alexandre Poussin. J’avais la grippe quand je lisais « dans les forêts de Sibérie ». Le froid de l’hiver en Sibérie apaisait ma fièvre. La vodka remplaçait le rhum. Dans quelques heures, nous allons nous envoler pour la Haute-Corse, la Balagne, un petit coin de paradis entre mer et montagne et je rêve d’aller vivre dans une cabane en Sibérie. Je rêve de me retirer du monde pour y vivre une expérience de contemplation totale. Je voudrais tant entendre craquer le lac Baïkal! Je voudrais écrire à la lueur d’une bougie et m’endormir dans la chaleur relative d’un feu de cheminée. J’ai beaucoup aimé l’adaptation pour le cinéma du livre « dans les forêts de Sibérie ». J’ai beaucoup aimé la musique d’Ibrahim Maalouf et l’acteur qui incarnait Tesson. Je l’ai aimé car il était dans la douceur, le ravissement et l’humanité. Chez Sylvain Tesson, on ressent un profond désenchantement qui va jusqu’au nihilisme. C’est triste!
Je l’ai déjà écrit mais si je devais partir vivre sur les bords du Baïkal, je ne partirais pas seule. Je voudrais partager cette expérience. C’est très personnel mais, pour moi, le partage est essentiel. Etre deux, ce n’est pas être toujours deux. Khalil Gibran a remarquablement décrit le partage au sein du couple dans son « Prophète ». Une lecture qui me porte toujours.
Nous allons nous envoler pour la Haute-Corse et je rêve de climat sec et froid. Je voulais glisser dans ma valise « dans les forêts de Sibérie » mais impossible de le retrouver. J’au dû le prêter mais je ne sais plus à qui. On ne devrait jamais prêter les livres et, toujours, les offrir. J’emporte « quand les soufis parlent aux chrétiens » du frère Alberto Fabio Ambrosio. Je me suis intéressée au soufisme en le découvrant lors d’une conférence au Sénat le 7 octobre 2013 sur l’Islam des lumières. C’est le photographe Reza qui était là pour expliquer la voie mystique de l’Islam et évoquer le poète persan Rûmi.
La Haute-Corse et le soufisme, la famille et les amis, la montagne et la mer, de merveilleux ingrédients pour passer de bonnes vacances!
A bientôt! Portez-vous bien et pensez à respirer!
Anne-Lorraine Guillou-Brunner