15°, un ciel gris clair, le magnolia qui déploie de larges fleurs blanches laissant deviner un coeur rose et un coucou qui chante sans doute depuis l’une des hautes branches du sapin. Cookie, notre petit chat, n’est rentré de sa virée nocturne que pour manger et laper un fond de lait dans un bol. Ce matin, seul Louis est parti pour le collège avec une casquette blanche vissée sur le crâne et un sac contenant la paire de chaussures qu’il a à peine portée et qu’il va donner à un de ses camarades qui grandit dans une famille où tout n’est pas simple tous les jours. Pour cet ami qui partage toujours son goûter, Louis m’a fait acheter une casquette noire, pendant de la blanche. Notre mère disait de Louis qu’il lui faisait penser à saint François d’Assise donnant son manteau en hiver à un malheureux qui grelottait. La générosité de Louis est très développée. Son conseil s’est tenu hier. Il est passé à un cheveu des « félicitations ». Louis a un profil assez proche de celui de sa grande soeur. Il aurait été bien plus heureux dans une école pratiquant une pédagogie dite nouvelle même si, maintenant, toutes ces pédagogies ont presque cent ans!
Je me demande s’il faudra accompagner Louis jusqu’au bac comme nous l’avons fait pour sa soeur aînée. La veille de son grand oral voici ce que j’ai écrit à notre Céleste: » Ma grande fille, demain, tu seras au nombre des élèves de terminale à ouvrir le bal de ce fameux grand oral qui aurait dû être une chance pour toutes celles et tous ceux qui sont timides et manquent de confiance en eux car les professeurs les auraient préparés dans la durée à cette nouvelle épreuve. On sait que ce n’est malheureusement pas ce qui s’est passé. Quand tu étais à la maternelle, Catherine, une de tes institutrices, m’a dit que l’école française « classique » serait compliquée pour toi et qu’il te faudrait une autre forme de pédagogie mais, ici, cela n’existait pas. Alors, sans relâche, à partir de la quatrième, et pour que tu ne dévisses pas, ton papa et moi, chacun dans ses domaines de compétence et à sa manière, nous avons tout mis en oeuvre pour t’accompagner. Nous en aurons vécu des moments pénibles, de vrais bras de fer jusqu’à cette soirée où tu voulais aller hier mais, aussi, tant de satisfactions! Ce soir, notre mission scolaire s’achève. Peut-être, seras-tu amenée à me solliciter pour la relecture d’un mémoire de fin d’étude et, bien sûr, je serai alors heureuse de le faire. A la fin de la seconde, tu m’as dit estimer être chanceuse que nous ne t’ayons pas « abandonnée ». On n’abandonne pas un enfant. On l’aide à surmonter ses difficultés. Tu es naturellement très à l’aise à l’oral. Tout ira bien demain! Pas trop de « du coup », de s »donc » et de « bref » et pas de « et caetera ». Je t’aime! ».
Le lundi, Céleste a a été interrogée sur la question qu’elle préférait, en arts plastiques: pourquoi il est important de sortir l’art des musées? Tout s’est bien passé. Céleste a cette chance d’être naturellement à l’aise à l’oral. Sans doute parce que jusqu’à aujourd’hui, elle ne s’est jamais vraiment investie à fond dans une matière ou alors très ponctuellement, les choses glissent sur elle. Je lui souhaite de conserver la même sérénité quand elle sera dans et sur sa voie. Les professeurs qui constituent les jurys semblent vraiment bienveillants, désireux de mettre les candidats à l’aise et ne cherchant pas à les charcuter sur des questions trop complexes.
Pour Victoire et ses amis, le lycée est fini. Victoire aurait voulu travailler mais comme ce n’était pas possible, elle part avec d’autres lycéens de l’aumônerie encadrer un pèlerinage VTT organisé pour une quarantaine de collégiens. Le staff lycéen sera chargé de monter et de démonter le camp itinérant et d’animer les veillées. Au rayon, montage et démontage de camp, Victoire est très rodée! Nos aventures sur le chemin de Stevenson ont contribué à faire des enfants des campeurs aguerris.
Ce matin, avec Stéphane et Fantôme, nous marchons en direction de chez Muguette en passant devant la propriété d’Aline et de Christophe et en empruntant un chemin de terre entre les champs de blé. Aline pousse une brouette qui grince comme les gonds d’une vieille porte grignotés par la rouille. Je m’invite pour un café matinal la semaine prochaine. Les coquelicots et de petites fleurs blanches se mêlent aux épis de blé. Fanny, une amie dont le mari est agriculteur, m’a écrit que la moisson de l’orge devait commencer la semaine prochaine.
Muguette est dans son potager avec Pépette. Stéphane qui a beaucoup trop de travail continue sa route. Le seau bleu qui contient les morceaux de pain sec pour les moutons est renversé dans la cour. Nous nous installons dans l’entrée. Comme toujours, Muguette s’assied sur les marches avec Pépette à ses côtés. Je prends la chaise de jardin. Muguette a le teint halé et les cheveux coupés aussi courts que ceux d’un militaire. Elle me fait penser à la soeur de notre grand-père paternel, tante Constance. Toute l’année, elle était bronzée et portait des cheveux très courts. Comme Muguette, elle était très musclée. Muguette me parle de ses cuivres qu’elle a récemment astiqués, de toute cette herbe qu’elle a arrachée dans son potager, de Mantine, la grand-mère de la ferme où, jeune fille, elle travaillait, qui faisait bouillir des orties et, ensuite, faisait tremper ses mollets dans l’eau pour activer la circulation sanguine. Comme je fais observer que j’ai admiré une rangée de magnifiques lys dans le jardin d’une fermette qui n’est quasiment jamais occupée, elle me raconte que lorsqu’elle était à la ferme, on mettait des fleurs de lys dans un flacon d’alcool à 90° et que cela servait en cas de coupures. Muguette s’en va et revient avec un très joli flacon fermé par un gros bouchon en liège. Elle en sort des fleurs de lys encore imbibées d’alcool.
Lundi prochain, Muguette recevra sa seconde injection contre le coronavirus. J’espère qu’elle ne fera pas de mauvaise réaction. Muguette est si dure au mal que je ne sais même pas si elle se rendrait compte qu’elle a de la fièvre ou des courbatures. Notre maman qui ne se plaint jamais et est capable d’endurer des douleurs physiques intenses sans rien en laisser paraître a été pas mal secouée après la seconde injection. Muguette me dit qu’elle est ravie que Rolland-Garros soit terminé car la diffusion des matchs de tennis la privait d’Affaire conclue. Nous regardons ensemble quand commence le tour de France. C’est samedi. Le départ sera donné depuis Landernau. Muguette aime par-dessus tout les épreuves de montagne.
Chez Muguette, je ne vois pas le temps passer. Je repars. Il faut que je pense à apporter à Muguette mes numéros de téléphone écrits en très gros caractères rouges. Ainsi, en cas de besoin, elle pourra m’appeler. Françoise et Philippe (les amis voisins de Muguette) sont rentrés hier. Ils continuent de vider la maison où ils ont vécu plus de trente ans. Un compromis de vente est signé. C’est un monsieur seul et retraité qui devrait venir s’y installer. Françoise nettoie ses plate-bandes. Je lui dis combien elle manque à Muguette, combien Muguette l’aime et Françoise se met à pleurer. Muguette et Françoise sont des « filles » de la terre. Elles sont pudiques et ne partagent pas leurs sentiments. Je dis à Françoise que Muguette est impatiente de la voir. Je réalise que Françoise devait avoir un peu plus de tente ans quand Philippe et elle se sont installés ici pour le travail. Je ne sais pas si leurs deux filles sont nées dans le Loiret. Quant à Muguette, elle devait avoir une petite cinquantaine d’années. Tout de suite, elles se sont entendues autour du potager et du jardin. Françoise apportait souvent des plants à Muguette. Dés lors que Françoise a pris sa retraite, elles passaient encore plus de temps dehors. Maintenant, Françoise est la grand-mère comblée d’un petit Anatole. Elle a toujours su qu’elle repartirait dans sa région natale où vit sa fille aînée.
Avant de clore cette chronique, je voudrais partager avec vous l’ouverture du cabinet parisien de thérapeute-chef d’orchestre de ma soeur. Si ma soeur a vécu pour sa passion du théâtre, elle a, dés son plus jeune âge, développé un intérêt aigu pour tout ce qui permettait de percer les mystères de l’âme humaine. Enfant, elle avait découvert sur les rayonnages de l’une des nombreuses bibliothèques de la bonne et vieille maison de Pont un petit livre sur la chiromancie et s’y était plongée avec délectation. Plus tard, il y eut le tarot et l’astrologie, l’entrée en analyse à l’âge de 20 ans et l’obtention d’un diplôme de graphologue à moins de trente ans. Quelle chance de pouvoir croiser autant de disciplines complémentaires et de proposer à ses patients des approches différentes s’adaptant à leur personnalité et aboutissant à une meilleure connaissance de soi et à la résolution de leurs difficultés! Quel parcours de vie! Quelle persévérance dans la quête du bonheur! La découverte de son site pourrait vous donner le tournis. Il est le reflet de 25 ans de travail et de 35 ans d’intérêt pour l’âme humaine.
www.deviensquitues.com
sur instagram virginieguillou_therapeute
Une belle journée à vous tous,
Anne-Lorraine Guillou-Brunner, une sophrologue en sabots