Chronique du temps de l’Avent et du temps de l’Après

Il fait doux ce matin. Luminosité faible. On avance vers le premier dimanche de l’Avent. Les villes sortent leurs habits de fête mais les habits brillent moins d’année en année…Le long des façades des barres HLM, c’est une débauche de guirlandes, de luminaires et de pères Noël qu’on croirait pendus dans l’indifférence générale. Plus on manque de tout et plus on se raccroche, en Europe, aux rites païens. Nous sommes bien loin de la ferveur du peuple bolivien à Sucre lors de la semaine sainte. Même Stéphane qui ne croit pas en Dieu mais en l’Homme est touché au plus profond par ses familles agenouillées aux pieds d’un Christ de lumière ouvrant largement ses bras immenses en cette nuit de vendredi. Dans l’aube naissante, en haut de cette colline surplombant les toits de la ville, brûlent les derniers feux d’eucalyptus.

 

Le Christ était mort. Dieu, son père, avait laissé hurler sa souffrance. La nuit était tombée sur le jour. La terre s’était ouverte. Le monde avait été à un cheveu de l’engloutissement, puis, le calme était revenu. Ponce Pilate venait de comprendre qui il avait condamné à la crucifixion. On avait décroché le corps supplicié du fils des hommes et Marie avait baigné de larmes silencieuses les traits gris de ce fils aimé jusque dans le choix (et non le sacrifice) de donner sa vie au nom d’une soit disant expiation d’un péché qui trouverait son origine dans la volonté de savoir d’un Adam téléguidé par le géni maléfique ( ?) d’une Eve aux formes de Messaline.

 

Elle est loin cette ferveur de ceux qui, renouvelant le pari de Pascal, espèrent tout de l’Après, de la résurrection, de la vie éternelle, qui croient en cet au-delà où toutes les différences seraient abolies : plus de pauvres et de riches, de chanceux et de malchanceux, de beaux et de laids, de jeunes et de vieux, de corps et d’esprits en bonne santé et malades, de chrétiens, de juifs, de musulmans, d’hindous, de bouddhistes, d’athées, de païens. Seulement des âmes refaisant la route de leur vie terrestre.

 

Reviendrons-nous ? Faut-il croire en cette vie après la mort, en cette vision tripartite comme dans un triptyque de Bosch : un paradis, un purgatoire et un enfer. Si Dieu est Amour, il est presque certain que ces visions héritées d’une autre époque sont totalement obsolètes et prêtes à rire. Si Dieu est amour, il sera le Père débordant de pardon et de compréhension pour la somme de nos petitesses, de nos égoïsmes, de nos manques de courage, de noblesse de cœur, de mains tendues, de portes non ouvertes, d’amis laissés sur le bord de la route, de pardons non exprimés, pour toutes ces chaînes dont nous n’aurons pas su nous libérer, pour ce dos tourné au Bonheur, pour avoir oublié la morale de Lafontaine « aide-toi, le ciel t’aidera ».

 

Faut-il croire en cette grande roue, en ce cycle des réincarnations ? Est-ce parce qu’elle existe, que nous avons déjà plusieurs vies au compteur que, parfois, nous éprouvons une re-connaissance d’êtres, de lieux, d’expériences ? Est-ce pour cela que l’européen sera viscéralement attiré par l’air qui souffle la nuit le long des plages du golfe arabo-persique, le bédouin par les rives du Saint Laurent, le canadien par la corne de l’Afrique, l’africain par le bush australien, l’australien par les cimes népalaises et le népalais par les glaces polaires ?

 

Faut-il croire au mythe platonicien selon lequel deux êtres ne font qu’un et, qu’avant de venir au monde, ils sont séparés l’un de l’autre ? Commencerait alors cette quête (parfois désespérée) de l’Autre, de notre part manquante. Certains réussiraient l’exploit de se re-constituer, de se ré-unir à cette autre part d’eux-mêmes : une sorte de rencontre entre le soleil et la lune, le yin et le yang, le blanc et le noir, l’animus et l’anima à l’occasion de laquelle les deux êtres s’emboîteraient parfaitement l’un dans l’autre, l’un avec l’autre, l’un pour l’autre, l’un à côté de l’autre. De cette ré-union naîtrait l’Equilibre, la Paix, l’harmonie, la Liberté. D’autres, aussi grands soient leurs efforts et leurs envies, n’y parviendraient pas, du moins cette fois-ci, et reviendraient tenter leur chance, à l’occasion d’un autre voyage mais plus forts encore car riches des expériences accumulées par le passé. Le cycle des retours s’achèverait-il après cette ré-union quasi cosmique ?

 

Ensuite, serions-nous des particules élémentaires évoluant dans l’infinitude du Cosmos ? Dans une approche chamanique, des parcelles de nous seraient-elles à trouver à la surface de l’écorce du baobab, dans les gouttes de rosée suspendue aux pétales de la rose, à lire au fond des yeux verts de cette panthère menacée d’extinction ou dans ceux de ce noble cerf dont le brame déchire la nuit solognote, à sentir dans ces grains de sable qui glissent entre les doigts de nos pieds nus sur une plage en été, à éprouver au contact de l’eau froide et pure émergeant d’une cascade alpestre à la fonte des neiges, à deviner dans le chant de ce petit rossignol qui illumine nos réveils ?

 

Peut-être, est-ce Nietzsche qui, en faisant parler Zarathoustra, a raison et qu’il s’agit alors, dans un cosmos fini, de l’éternel retour du même.

 

Ou bien, la vie est Une, Indivisible, strictement terrestre et tous les dieux et les différents Dieu(x) ne sont que des créations humaines, des moyens de se rassurer, de comprendre l’inexplicable, de lutter contre notre peur de la dernière heure, de cette nuit éternelle qui nous enveloppera tous sans considération de réussite, d’honneurs, de carrière, de pouvoir, de bonheur.

 

Alors, finalement, que nous croyons ou pas, la
sagesse réside encore dans le « carpe diem » le « cueillez dés aujourd’hui les roses de la vie » car on ne sait jamais de quoi demain sera fait.

 

Bonne fin d’année,

 


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