Lundi 12 janvier. Plus
d’une heure pour arriver place de la Nation. 40 minutes à poireauter sur le
quai du RER B, comme des dizaines d’autres qui sont bientôt des centaines, dans
cette gare aux courants d’air. Aucun endroit où s’abriter de ce froid alpin. Pas
de train. Pas d’explication. Rien que de très normal, finalement, pour une
ligne gérée par la SNCF et habituée aux mouvements sociaux durs, très durs.
Arrivée à Châtelet, l’attente reprend mais les panneaux affichent la
couleur : accident de voyageur en gare de Nanterre Préfecture. Je
sais que bon nombre de Parisiens estiment qu’on devrait purement et simplement
interdire ce genre de suicide spectaculaire qui choque les âmes sensibles et
enquiquinent les grincheux du matin, les « non Ricoré. Je suis même certaine
que certains usagers du service public pourraient achever, à mains nues, les
dépressifs qui non seulement se seraient ratés mais auraient, en plus, gâché
leurs retrouvailles avec leurs collègues autour de la machine à café.
En fait, on pourrait
demander à Rachidi Data d’accoucher d’un décret pour les faire incarcérer. Au
moins là, derrière les hautes murailles des établissements pénitentiaires, bien
au chaud à 4 par cellule, ils pourraient se réussir dans l’indifférence
générale. Car quand même, il ne manquerait plus que la vie à l’ombre du mitard
soit un long fleuve tranquille, l’endroit rêvé pour prendre des vacances longue
durée aux frais du contribuable et pour se reconstruire tant humainement que
professionnellement en vue d’une réinsertion sociale. Magistrat, je n’aurais
jamais pu me résoudre à envoyer un jeune adulte dans l’enfer d’une prison dont
on ne sort plus que pour y mieux retourner.
Hier, promenade dans le
parc de Sceaux que je découvre sous
enfants qui font de la luge, des adultes amoureux qui redeviennent enfants et
se courent après pour se jeter des boules de neige. Des petits chiens rendus
fous par cette poudre blanche. Une belle exposition de photos en plein air sur
le thème de l’habitat aux quatre coins du monde. Stacey Kent dans les oreilles.
Les eaux des bassins, des fontaines transformées en glace. La montagne et ses
bonheurs simples à altitude 0. Un peu plus loin, un peu plus tard, je
surprendrai l’eau de la fontaine du Luxembourg, au bas de
immobilisée, telle une sculpture de Lalique. Mon oreille s’étonnera de ne pas
entendre le son cristallin de l’eau perceptible, pourtant, au milieu du flot
incessant des voitures. Paris est, comme une bonne partie de la France, en
prise avec une vague de froid continental.
Que les Marseillais
soient surpris par
centimètres
la Bonne Mère ne sache plus à quel saint se vouer pour faire cesser les
carambolages phocéens, je dis amen. Que Gaudin prenne ombrage de ce que le gouvernement
ait diligenté une enquête pour comprendre les raisons d’une telle panique
climatique sur fond de cyclothymie méditerranéenne, je comprends. Mais que dans
le Centre de la France, la Haute-Loire, les Causses et en Ile de France, on
ouvre des yeux ronds parce que le baromètre affiche -15°, je dis NON !
Si vous voulez bien,
rafraîchissons nos mémoires et rouvrons nos livres de géographie de classe de 6ième,
au chapitre « les climats de l’hexagone ». Qui lisons-nous ? Que
la France est un pays subissant des influences climatiques diverses allant du
climat continental au climat méditerranéen en passant par un climat océanique.
Qui dit continental, dit froid l’hiver et chaud l’été. Normalement, et dans les
deux cas, sec. Bien sûr, les disputes d’experts en climatologie ne rendent pas
l’enseignement de la matière simple car il faut l’admettre, un certain
réchauffement du climat tend à faire oublier l’influence continentale.
Quand nous étions,
justement, ces petits collégiens de sixième, en général, tout perdu dans ces
grands lycées et que nous doutions de pouvoir jamais trouver nos marques dans
cette jungle où se télescopaient des bleus de 10 ans et de grands ados de 18,
nous avions très froids l’hiver. Surtout si nous avions la chance d’habiter,
par exemple, au Mans, dans la Sarthe, département 72 ou bien encore à Castres,
dans le Tarn, département 81. Les hivers étaient rudes mais souvent secs. Nous
les traversions sans obliger nos parents, et en particulier nos mères, à se
lever la nuit pour changer nos draps et nous laver en raison des épisodes de
gastro. Nous ne connaissions pas encore les mots « bronchiolite »,
« kiné respiratoire ». Les printemps arrivaient comme des vraies
promesses de changement de saison. La nature renaissait et nous aussi qui
avions, finalement, trouvé nos marques au lycée. Puis la fin des vacances
sonnait et les tableaux noirs se recouvraient, en cachette de « vive les
vacances ».
Cette expression rimant
avec mères stressées devant valises à boucler, maison à ranger, machines à
faire tourner, plantes à arroser, bouchons sur la N7 ou l’A7, divorce des
parents dans la voiture, enfants qui se disputent, bains de mer, marches en
montagne, grains de sable collés sur la peau, pique-niques, chips grasses,
glaces italiennes, coups de soleil, odeurs de crème solaire, liberté de nuits
plus longues et éclairées par des étoiles filantes dans un ciel d’août, cartes
postales à envoyer aux vieux membres de la famille ou aux jeunes amis, devoirs
de vacances serait rageusement effacée par un professeur de français tiquant
devant une faute grammaticale impardonnable et consistant à ne pas avoir
conjugué à la troisième personne du pluriel le verbe « vivre ».
Après deux mois, le teint
hâlé, les pantalons trop courts, les cheveux décolorés, nous refermions la
valise sur des heures de pêche aux crevettes, aux coques encore comestibles à
marée basse, de farniente sur une plage au soleil, de cours de natation, des
dîners légers, des pères moins sévères, des mères moins tendues, des parents à
nouveau amoureux, des bals du 14 juillet, des feux d’artifice du 15 août, des
tours de manège, et, parfois, la valise ne se refermait pas tout à fait car
notre cœur battait au rythme d’un amour de vacances qui serait chassé par un
autre été.
Avec nos cartables
sentant bon le cuir neuf, nos belles fournitures scolaires, nous abordions
cette nouvelle année avec volonté de bien faire et de rendre nos parents fiers
de nous. Et puis, bien vite, le cartable traînait dans la poussière, les
cahiers bien tenus se couvraient de ratures, les carnets de notes n’étaient pas
toujours brillants. Nous nous sentions comme le cancre de Jacques Prévert. Nous
avions alors envie de dire oui à ce que nous aimions et non au professeur et
d’attendre q’un oiseau entre par la fenêtre et nous libère du poids d’un
enseignement trop académique. Nous, nous ne courions pas après les palmes.
Heureusement, l’été se faisait indien. Joe Dassin nous faisait aimer les
tableaux de Marie Laurencin. L’automne faisait tourner les pages du calendrier.
En forêt, nous foulions les feuilles mortes que personne n’aurait songé à
ramasser à
premier bulletin trimestriel tombait et avec lui pleuvaient les compliments ou
les critiques. Le cartable s’était couvert d’inscriptions surtout que c’était
la mode des sacs à dos US. Has been, le cuir ! Tendance, la toile de jean
recouverte de ACDC ou Scorpion !
21 décembre, solstice
d’hiver, froid piquant et 4 jours de Noël et de ces cadeaux que nous espérions
sous le sapin. Vous, je ne sais pas mais moi je l’ai aimé cette fenêtre
continentale. J’ai aimé cette sensation de la montagne à Paris, ces nuages
formés par le souffle, les vêtements dans lesquels on s’emmitoufle et qui nous
font ressembler au petit bonhomme Michelin. J’ai, aussi, avec les enfants et de
retour à la maison, goûté cette rencontre magique entre une lune montante
ronde, argentée, énorme et un soleil rouge, orangé, violet couchant. Bien sûr,
mon cœur s’est serré devant le bilan des sans abris vaincus dans leur sommeil
par le froid et devant ses femmes et enfants roumains exposés aux courants
d’air glacial des couloirs du métro.
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